La Nouvelle, de Cassandra O'Donnell
En voilà, un roman qui sera bien utile à ouvrir un peu les mentalités ! Je suis bien contente que l'autrice m'en ait proposé la lecture.
Une nouvelle élève arrive au collège de Gabriel, Haya ; elle est syrienne...
La première pensée qui me vient à l’esprit est : qui est donc l’illustrateur.ice ? Car ce visage grave, en noir et blanc, me rappelle d’autres images. Ou bien, il m’interpelle. Haya est là, devant nous, lecteurs. Elle nous regarde droit dans les yeux, sérieuse et grave, les mains posées sur le cœur. Derrière elle, dans le ciel, volent de petits morceaux de feuilles, emportés par le vent. Tout derrière, indistincts et formant une ombre rouge, comme une barrière, des silhouettes de garçons et de filles. Cette histoire va nous présenter Haya, telle qu’elle arrive en France, portant vêtements et sacs européens, mais conservant le cœur de qui a vécu la guerre et l’exil.
J’ai aimé les personnages de Gabriel, de Mamie et d’Haya, bien sûr. Ils contrebalancent bien les jugements à l’emporte-pièce qu’une voisine émet étourdiment sur le pas d’une porte, ou les paroles violentes que de jeunes garçons crachent à la figure d’Haya, relayant, sans réfléchir la pensée des adultes. Gabriel a la curiosité et l’ouverture d’esprit qui lui permettent d’accueillir ce qui lui est étranger, sans jugement ni questions incongrues. Question de personnalité ? Question d’éducation aussi.
Mamie vit avec la famille, depuis qu’elle a été malade (Là aussi, il y a une forme d'engagement de l'autrice : on ne laisse pas ses vieux décliner en maison de retraite.). Elle a un tempérament bien trempé et sait guider Gabriel dans sa découverte d’Haya. Car Mamie cache un secret, un secret que peu à peu le roman dévoile. Elle est un peu le double d’Haya. Elle nous rappelle ainsi que ce n’est pas la première, ni la dernière fois que des populations se réfugient en France. A se demander comment les Français ont réagi avant... Étaient-ils aussi bornés et sur le quant-à-soi qu’aujourd’hui ? Sans doute, oui. La bêtise a de beaux jours devant elle, l’égoïsme aussi.
Haya est un personnage étonnant. Elle n’a pas l’air touché par la violence des paroles de ses camarades, par le racisme ambiant. Évidemment, si on emprunte un tant soit peu la lucarne par laquelle elle regarde le monde, elle a vu bien pire...
C’est en cela, d’ailleurs, que Cassandre O’Donnell réussit son coup : rien que de très ordinaire dans la vie de Gabriel et d’Haya qui se rencontrent dans une petite ville de Bretagne, mais à regarder à l’intérieur de leur cœur, le lecteur s’aperçoit de la beauté d’un regard sur le monde, de la grandeur de la résilience de ceux qui ont vécu des drames. Et tout cela dépasse, de loin, la mesquinerie de qui n’a pas un jour regardé le monde avec ses yeux-là.
Ce roman est d’utilité publique. Je pense d’ailleurs que si je n’étais pas en arrêt pour confection d’être humain, je le lirais à mes classes, comme j’ai l’habitude de partager certaines lectures qui font grandir et voir les choses autrement. Pas grave : ce n’est que partie remise à l’année prochaine. Entre-temps, je pense le prêter à certaines personnes. J’ai d’ailleurs déjà ma petite idée à qui...
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