La Maison Bleu horizon, de Jean-Marc Dhainaut
J’ai dévoré La Maison Bleu horizon en quelques soirées seulement, allant même jusqu’à largement retarder mon heure de coucher, moi qui d’habitude suis si disciplinée les dimanches soirs...😱
Il faut dire que Jean-Marc Dhainaut écrit dans un genre qui me parle, le fantastique, et sur une thématique que je côtoie beaucoup sur les écrans depuis quelques mois : les phénomènes de hantise. Joel, des éditions Taurnada, a eu le nez fin de me proposer cet ePub.
Résumé de l'éditeur :
"Janvier 1985. Tout commence par un message laissé sur le répondeur d'Alan Lambin, enquêteur spécialiste en phénomènes de hantises. Une maison, dans un village de la Somme, semble hantée par un esprit qui effraie la famille qui y vit. En quittant sa chère Bretagne, Alan ignore encore l'enquête bouleversante qui l'attend et les cauchemars qui vont le projeter au cœur des tranchées de 1915. Bloqué par une tempête de neige, sous le regard perçant d'un étrange corbeau, Alan réussira-t-il à libérer cette maison de ce qui la tourmente ?"
Le personnage d’Alan Lambin est intéressant en ceci qu’il a baigné dans le folklore breton : sa grand-mère semble avoir été plus ou moins son initiatrice dans le domaine du surnaturel. Mais ses études, d’un scientifique tout rationnel, qui viennent offrir une garantie supplémentaire à ses observations et témoignages et poser un cadre rigoureux à ses expériences, butent aussi contre les phénomènes auxquels il est confronté et qui l’attirent. Ainsi, le personnage est-il toujours écartelé entre sa pensée rationnelle et ses enquêtes.
Il semble plutôt bien entouré : une jolie assistante aux dons de médium et un ami « ingénieur » susceptible de lui fournir la technologie dernier cri.
Cependant, cette enquête, il va devoir la mener seul, faire confiance à ses propres observations, ses appareils et sa capacité d’analyse. Isolé du monde extérieur par une tempête de neige qui coupe les lignes téléphoniques et l’empêche de sortir de la maison, il affronte le cadre idéal aux phénomènes de hantise : la grande et vieille maison de maître, qui fait craquer ses planchers, siffler sa toiture et provoquer les imaginations les moins fertiles.
Digne d’une enquête policière de premier ordre, l’intrigue est rondement menée. Alan récolte des indices sur les divers phénomènes qui hantent la maison, mais aussi sur la famille qui l’a appelé au secours. Avec lui, le lecteur tente de recoller les morceaux sans bien y parvenir.
Heureusement, les destins qui s’y jouent sont si attachants qu’on tourne et tourne les pages pour savoir ce qui arrive à chacun : pourquoi le père de famille ne sonne-t-il pas de nouvelles ? Pourquoi la domestique est-elle si en retrait ? Que se passe-t-il avec le petit Thomas, qui semble bien trop calme ? Quels sont ces rêves étranges qui viennent visiter Alan ? Et ce soldat ? Que lui est-il arrivé ?
Chaque morceau d’histoire s’intrique parfaitement dans la trame générale, soutenant le rythme et nous poussant sans cesse à poursuivre la lecture. Les personnages ont une psychologie très réaliste ; leur histoire est si vraisemblable qu’on croirait que l’auteur ne nous propose pas une histoire mais un témoignage.
La mythologie qui entoure le travail d’Alan est bien approfondie. Au fil des pages, on a accès à ses propres conceptions des hantises, tantôt véritables, tantôt psychologiques. Son raisonnement tient le route et nous guide, même si Alan connaît aussi ses faiblesses : le monde qu’il explore est aussi fascinant qu’il est mystérieux ; sa propre vision des choses pourrait donc être amenée à se modifier.
Même si j’ai vu venir certains retournements d’intrigue, cela ne m’a pas dérangée car la structure du récit était si dense qu’elle m’a permis d’être surprise, voire émue, sur d’autres points. Par ailleurs, il ne me semble pas illogique de voir les choses se faire puisqu’on suit pas à pas les raisonnements d’Alan.
Et puis, on voyage dans ce roman et on apprend. D’accord, Alan est enfermé dans la maison des Anneraux, mais quelle magnifique maison, propice à susciter tous les fantasmes gothiques et historiques ! Et puis, à travers ses rêves, on revit l’univers des tranchées de la Première Guerre Mondiale. L’auteur ne nous épargne rien, ni ce qu’on y voit, ni ce qu’on y sent, pas plus que ce qu’on y ressent. Voilà le supplément d’âme que tous les livres devraient avoir : nous faire prendre conscience d’une certaine vision du monde, nous apprendre quelques éléments de plus sur ce qui nous entoure, nous ouvrir les yeux.
Concernant l’écriture, le roman n’est pas parfait. La plupart du temps fluide, la narration souffre de quelques (assez rares) approximations d’expression et surtout, d’un choix contestable des temps des verbes et de certaines expressions de temps dans les concordances des temps, notamment dans les nombreux flash-back, mais aussi dans les quelques anticipations. Toutefois, il s’agit, selon moi, d’un problème très ciblé (la concordance des temps), que l’auteur parviendra à résoudre en se penchant dessus.
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