Poumon vert, de Ian R. MacLeod



J’ai acheté Poumon vert, de Ian R. MacLeod, quand je l’ai rencontré sur une étagère du Centre Culturel Leclerc de Granville. J’ai été charmée par le format, l’élégance de sa couverture et le bandeau indiquant qu’il avait reçu le Prix Asimov’s Science Fiction.

Il ne restait plus qu’à trouver un moment pour m’y plonger.
L’occasion s'est présentée lors d’une descente de PAL.




Résumé de l’éditeur :
Lors de sa douzième année standard, pendant la saison des Pluies Douces habarienne, Jalila quitte les hautes plaines de Tabuthal. Un voyage sans retour - le premier. Elle et ses trois mères s’installent à Al Janb, une ville côtière bien différente des terres hautes qui ont vu grandir la jeune fille. Jalila doute du bien-fondé de son déménagement. Ici, tout est étrange. Il y a d’abord ces vaisseaux, qui percent le ciel tels des missiles. Et puis ces créatures d’outre-monde inquiétantes, qu’on rencontre parfois dans les rues bondées. Et, enfin, surtout, la plus étrange des choses étranges, cet homme croisé par le plus pur des hasards - Oui, un... mâle. Une révélation qui ne signifie qu’une chose : Jalila va devoir grandir, et vite ; jusqu’à percer à jour le plus extraordinaire secret des Dix Mille et Un Mondes...




Ce qui est sûr, c’est que le Bélial’ et moi n’avons pas eu, du tout, la même lecture du roman de Ian R. MacLeod. Je n’ai jamais eu le sentiment que Jalila remettait en cause le déménagement, ni que l’existence du garçon servait de déclencheur à quoi que ce soit, ou encore que ce que Jalila découvrait fût LE secret des Dix Mille et Un Mondes.


Voici donc MA lecture de Poumon Vert.


Poumon Vert est un roman exigeant envers son lecteur. Jusqu’à ce que je m’immerge dans ce livre, j’avais oublié les règles de la science-fiction, comme elle exige de son lecteur de s’adapter à un nouvel univers, à de nouvelles règles, à un nouveau vocabulaire.
Jalila vient d’ailleurs, d’un endroit où elle a été isolée, vivant dans le cocon familial constitué par ses trois mères, au plus près du ciel et des étoiles. Visiblement, ses douze ans marquent un seuil, qui amènent ses mères à faire le choix de s’installer dans une ville de bord de mer.
Bien qu’on peine à imaginer d’où vient Jalila, on est aussi dépaysé qu’elle lorsqu’elle emménage à Al Janb. Elle est perdue au milieu de tant de gens, déstabilisée par les différentes espèces qui peuplent la ville, envahie par les sensations visuelles, olfactives et tactiles qui l’assaillent.
Une initiation commence, qui s’appuie sur ses différentes expériences dans la ville, au gré de la nécessité biologique, des interactions sociales et du hasard. Ainsi, Jalila tombe-t-elle amoureuse ; ainsi apprend-elle, au contact de Kalal, qu’on peut agir et penser autrement que dans la société exclusivement féminine dont elle a l’habitude ; ainsi fait-elle la rencontre de la tariqa, qui l’intrigue autant qu’elle lui répugne.
Peu à peu, Jalila fait son chemin et ce qu’elle découvre, ce n’est pas le secret des Mille et Un Mondes, c’est qui elle est et ce qu’elle veut. Son chemin est fait de choix plus ou moins heureux et de fatalité.


Le lecteur aussi subit une initiation. 
Le style est un premier choc : tous les accords au pluriel se déclinent au féminin. Et oui ! Ces mondes sont gouvernés par les femmes ; les hommes ont fait leur temps ! 


"Les gens étendaient leur linge à travers la rue. Elles se querellaient et fumaient en public. Certaines mangeaient en tenant la nourriture à deux mains. Elles vous regardaient passer, apparemment indifférentes au fait que vous leur rendiez leur regard."

La société qui a été construite comporte des caractéristiques féminines que l’auteur reprend au harem, comme la sensualité et la jalousie, mais elle ne semble pas meilleure que la nôtre : Jalal et son père sont taciturnes, parfois violents, parfois orgueilleux, mais Jalila a aussi l’orgueil de sa jeunesse ; les sentiments que suscitent la situation des femmes en harem peuvent être violents, même si c’est à peine évoqué dans le roman. La société est différente, mais pas meilleure. 
Les rapports homme-femme sont abordés par le biais de l’intégration de Kalal et de son père dans la ville : une certaine tolérance laisse vite place au rejet. Ils apparaissent également dans la relation entre Jalila et Kalal. Bien que la jeune fille montre de la curiosité et de l’ouverture envers le garçon, les malentendus et l’incompréhension les empêchent de vraiment se rencontrer : est-ce dû à une différence biologique ? Aux circonstances ? Ou aux choix pas tout à fait conscients que Jalila fait à cause de la société dans laquelle elle vit ?


"En rentrant au haremlek étonnamment tôt, (...) elle s'essuya puis s'enfouit dans sa tentexplo, décidée à mener les recherches les plus fouillées possible sur les fameux hommes. (...) Il fit ensuite une recherche sur le mot viol, afin de vérifier qu'il s'agissait bien de ce qu'elle s'imaginait, frissonna, mais n'en examina pas moins dans le moindre détail holographique les parties de lui-même dissimulées par le short de Kalal pendant qu'elle l'aidait à ranger les cordages. Après quoi elle se sentit désolée pour lui. Cette laideur et cette inutilité... Etait-il né par accident ? S'agissait-il d'une malédiction ?"

Je n'ai pas encore bien saisi le rôle du poumon vert dans cette histoire (Si vous le découvrez, n'hésitez pas à me l'expliquer en commentaire !). Peut-être symbolise-t-il l'adaptation de la jeune fille aux différents mondes auxquels elle est confrontée ? Mais alors, quelle importance revêt-il pour Kalal ? Bien des mystères entoure encore le jeune homme, dont je ne m'explique pas certains gestes ou certaines attitudes (Pareil, si vous avez une idée : partagez-la avec moi !).


Peu d'évènements dans ce livre, mais davantage l'expérience d'une immersion dans un autre monde, où une jeune fille apprend à grandir. Je recommande Poumon Vert non pas en dépit de son exigence, mais POUR son exigence. Et la poésie de ses descriptions.





***

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Commentaires

Le Coin d'Audrey a dit…
Avec une telle présentation du roman, comment ne pas être intriguée ?! Hop, dans la liste de "A lire dès que possible", mais je pense qu'il faut que je sois prête à le lire ☺

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