Les Terres Interdites, Tome 1 des Pirates de l'Escroc-Griffe, de Jean-Sébastien Guillermou

       
J’ai rencontré ce livre, presque par hasard, lors de la GrosseOP des Editions Bragelonne, Milady et… et ? Bref, une opération à ne surtout pas rater, puisqu’elle permet de faire un shopping de malade sans se ruiner : des ebooks à 0,99 euros ! Kyaaaaaaah ! (M’en suis sortie avec un peu moins de 32 euros pour 32 livres numériques, tout de même !!)

Mais passons.

Notre ami  a donc été sélectionné parmi une centaine de candidats à la journée. Pourquoi donc ? Je crois que la fétichiste en moi a encore frappé car… j’ai fondu pour sa couverture : mélange de plaques de métal bleutées, de rouages et de mer. A l’arrière-plan, une énorme tortue barbotte dans l’eau, portant sur son dos, une île verdoyante. J’ai aussitôt pensé aux Annales du Disque-Monde de Terry Pratchett et ça m’a fait voyager. Puis, suis allée vérifier le score du bouquin sur Babelio, qui affichait un beau 4 et quand Babelio affiche un 4, c’est que je peux me lancer sans hésiter !

Ce n’était pas un premier choix dans mon challenge à piles, mais le Défi PKJ de Juillet m’a convaincue de l’adopter : bah oui, titre bleu, tout ça. Mais comme je ne l’ai pas fini en temps et en heure et que visiblement, il me rapporterait plus de points en Août… Bref.

Alors de quoi ça parle ?

Le récit commence in medias res : Caboche, jeune orphelin de 16 ans, vient de s’échapper de l’orphelinat militaire où il était enfermé depuis que les mousquetaires noirs ont causé la mort de sa mère. En prime, il a volé une pistorapière (ambiance steampunk…). Recherché par les mousquetaires noirs à la solde du roi-tyran, il mène sa propre quête : trouver son père, un pirate qui a disparu avant qu’il ne le connaisse. Dans un grand tumulte de courses-poursuites, de bagarres et de tirs croisés, le voilà embarqué sur l’Escroc-Griffe, avec Bretelle, le Capitaine, et son équipage de bras cassés : le gros costaud narcoleptique, le petit ventriloque bizarre, l’homme-iguane, le Maître-Coq à la ceinture étrange… Comme le jeune garçon pense que Bretelle peut l’aider à retrouver son père, il échange une information contre sa place sur le bateau : si le Capitaine veut retrouver l’inestimable trésor des Cylindres Chénis, il doit retrouver la Belle-Lili, qui connaît la route…

Certains lecteurs ont regretté que les personnages et leurs relations ne soient pas assez approfondis au profit d’une action beaucoup trop trépidante.

Bon.

Je dirais qu’aucun de ces points ne m’a posé problème. En effet, je me suis attachée à ces personnages atypiques, très souvent estropiés, jamais très glorieux au premier abord mais ayant toujours assez sous la pédale pour créer la surprise en temps voulu. Bien sûr, la Belle Lili fait potiche à un moment. Bien sûr, Biceps, l’Obus, Doc et Chef Plumeau n’ont pas la part aussi belle que Caboche, Bretelle ou Goowan, l’homme-iguane, mais l’intérêt me semblait davantage dans la relation paternelle qui unit Caboche et son Capitaine donc, je n’ai pas tiqué. De toute façon, il y aura probablement de quoi se nourrir dans les tomes 2 et 3…

Quant à l’action trépidante, bah oui, elle l’est, mais ça ne tombe pas comme un cheveu sur la soupe, ou comme une obligation de page-turner. Chaque rebondissement m’a semblé logique dans ce récit de piraterie, de fantaisie et de steampunk : l’attaque d’une forteresse imprenable, la tempête dont on ne revient pas, le tourbillon dont on revient encore moins, le brouillard magique…

Car, il faut le dire : ce roman nous propose une libre réécriture de l’Ile au Trésor de Stevenson. La relation entre le jeune garçon et le Capitaine fait penser à celle qui existe entre Long-John Silver et Jim Hawkins (L’auteur sait très bien en jouer d’ailleurs, pour nous faire tourner en bourrique : c’est qui le traître, hein ? C’est qui ?). Chacune des aventures rencontrées sur un navire de pirates, à la fois incontournables et pièges à clichés, se trouve vivifiée par le souffle fantaisiste et steampunk. Ainsi la forteresse est habitée par de vieux automates dont on a perdu le mode d’emploi. Le brouillard transforme l’apparence des hommes pour faire apparaître leur animal totem (On est quasiment dans le jeu graphique, là. D’ailleurs, je n’ai pas pu m’empêcher de penser au passage dans l’usine d’abstraction dans Vice-Versa…) et cette « vrume » représente un raccourci aléatoire vers les quatre coins des mers du Fleur-Monde. Le tourbillon devient une sorte de siphon maléfique qui engloutit les navires et joue les sirènes auprès des âmes torturées… J’ai trouvé cette idée géniale.

Par ailleurs, l’univers créé regorge de trouvailles et d’idées recyclées, comme des clins d’œil à des œuvres antérieures.

Terry Pratchett imagine un monde plat qui repose sur quatre éléphants ( ?), eux-mêmes installés sur une énorme tortue qui parcourt la galaxie (Corrigez-moi si je me trompe…) ? Qu’à cela ne tienne ! Jean-Sébastien Guillermou invente le Monde-Fleur que réchauffe Sol. Quand la nuit vient, les pétales se referment sur le monde.

Boris Vian a imaginé qu’un piano puisse créer des cocktails pourvu qu’on ait l’imagination assez fertile pour créer des mélodies ? Eh bien, voilà le Chef Plumeau qui prépare un nénu-quelque chose en tapant sur les touches d’un piano.

On ajoute à cela quelques éléments steampunk, comme l’hydrodéon, la technologie Chénie, les prothèses de Bretelle ou de la Belle-Lili, les pistorapières…

On saupoudre d’une ambiance de roman de capes et d’épées : dans cette histoire, on parle de Rois, de Cardinal, de Mousquetaires…

On agrémente le tout avec des personnages qu’on désigne par leurs surnoms : délicieusement truculent ! Le gros costaud s’appellera Biceps, le Cardinal Vélin, les rois-tyrans Mange-Sang ou Noir-Sang, le limier coriace L’Amiral-Fantôme…

Et me voilà conquise, emportée avec les pirates de l’Escroc-Griffe.


Excellent choix de lecture de vacances qui emporte son lecteur dans les sillons bouillonnants d’un navire et de son équipage qui ne paient pas de mine mais qui sont plein de ressources.


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